Sa conscience commençait à doucement émerger, laissant ses paupières lourdes se relever peu à peu pour se faire transpercer par la lumière funeste du jour. Ses souvenirs semblaient décousus, mais peu à peu, elle se rappela de ce qu’il s’était passé sur son île, sur ce qu’il s’était passé, sur ce sombre tableau qui risquait à jamais de changer les choses. Sin était revenu après tant d’année d’hibernation. Il était revenu au pire moment, attaquant tous ses pauvres innocents incapable de se défendre, qui pensait profiter innocemment d’une soirée magique et paisible. Certains s’étaient battus, tout comme elle et Seiji qui s’étaient retrouvés avec un groupe pour protéger les derniers réfugiés d’une squame, puis, tout s’était déroulé si vite… Beaucoup trop vite pour son esprit qui avait du mal à se resituer. Elle aurait dû se trouver dehors, sur le sol, mais au lieu de cela, elle était dans une tente, son corps sur un lit de secours. Essayant de se relever, la demoiselle constata la douleur qui endolorissait ses membres, des bleus se dessinaient ici et là suivis de quelques éraflures et blessures minime. Dans son malheur, elle avait eu de la chance, surtout après s’être fait attraper par les tentacules de ce monstre sanguinaire. Elle s’en était mieux sortis que les milliers de cadavres de la plage, où des blessées plus graves qui devaient se battre entre la vie et la mort. Alors elle essayait de se relever avec force, combattant la douleur pour reprendre de plus en plus conscience, pour se maintenir en vie. Levant le regard, elle constata sa mère et son père à travers la porte de la tente, l’un contre l’autre, son père tentant vainement de calmer les larmes qui secouaient le corps de sa femme. Elle semblait si triste, si désemparée et doucement Akemi ressentis une part de culpabilité. Était-ce de sa faute si sa mère était dans cet état ? Elle baissa doucement la tête, n’osant interpeller sa famille, quand son père s’approcha enfin de sa fille avec un air soulagé, bien que légèrement grave.
En le voyant Akemi s’attendait à tout de sa part. De la colère, de la remontrance, des leçons de morales, mais au lieu de ça, elle sentit les bras de son père l’entourer de sa chaleur réconfortante, ses faibles paroles descendirent dans son oreille comme une prière enfin exaucés. « Je suis heureux que tu sois en vie ma fille. Je n’aurais pus concevoir te compter dans les défunts. » Doucement, la jeune femme ferma les yeux et serra à son tour son père avant de sentir les bras de sa mère s’ajouter à cette étreinte. Elle avait l’impression que cela faisait une éternité qu’elle n’avait pas vue ses parents. Que cela faisait des années qu’elle s’était enfuie loin de son chez elle, de sa zone de confort. Doucement, l’émotion perturbant ses sens, elle laissa quelques larmes couler le long de ses joues, ses lèvres se confondant en excuse, comme si elle regrettait ses décisions et sa fuite. Avec douceur, ses parents la réconforta et doucement, comme surprise de voir une personne manquante, Akemi commença à demander où était Seiji, son cher ami et gardien, mais aussitôt, le visage de ses parents se fermèrent et de nouveau, la mère de la demoiselle se mirent à pleurer, inconsolable ne laissant le choix à son père de devoir expliquer la situation. « Akemi… La mère de Seiji à perdue la vie dans la bataille contre Sin. Elle fait partir des nombreux défunts de la plage… Seiji est sûrement partit retrouvé son corps… Elle est morte en héroïne, sache-le.»
Sous l’effet de l’annonce, Akemi se retrouva perturbée, son sang se glaçant aussitôt face à cette nouvelle. Sa respiration s’était comme arrêtée le temps de digérer la nouvelle. La mère de Seiji était morte ? C’était impossible. Elle qui était forte, combattante. Qui n’avait peur de rien et qui était prête à tout pour les gens de cette île. Comment avait-elle pus… Mourir ? Doucement les larmes remontèrent à nouveau dans ses yeux, et la peine commença à serrer son cœur. Dans quel état se retrouvait Seiji ? Comment allait-il faire à présent maintenant qu’il était orphelin ? Elle n’arrivait à penser à autre chose qu’à cet homme qu’elle aimait et qui devait éperdument souffrir dans son coin. Alors, elle commença à doucement se relever, son père se tenant à ses côtés pour lui éviter une chute dû à ses membres fatigués.
« Seiji… Je dois retrouver Seiji, on ne peut pas le laisser seul comme ça ! »
« Tu dois te reposer ! Les prêtres t’attendent pour la cérémonie d’accompagnement. Ils ne toléreraient pas que tu t’absentes même pour quelques minutes. »
« Papa ! Je ne peux pas abandonner Seiji. Il a perdu sa mère ! Ils peuvent bien attendre, il y a des choses plus importantes. »
« Akemi ! » La voix de son père devint soudainement autoritaire et stricte, bien plus qu’à l’accoutumé, ce qui stoppa aussitôt la jeune invokeuse qui le regarda surprise par son ton. « Tu es devenue une invokeure. Tu as des responsabilités à présent que tu ne peux fuir, ni te dérober. Des milliers de gens sont morts, ça ne s’étends pas qu’à la plage et à Seiji. Il y a la forêt et le temple qui ont aussi étaient touchés. Je sais que tu t’inquiètes pour ton ami, que tu aimerais le retrouver. Mais tu ne peux plus faire ce que tu souhaites comme tu en as envie. Tu as un rôle, un devoir à accomplir. » Il posa doucement ses mains sur les épaules de sa fille, la tristesse commençant alors à emplir ses yeux. « De plus… Il faut que tu laisses du temps à Seiji. Il a besoin de se retrouver seul. Pour le moment, je pense qu’il est plus sage de le laisser le temps qu’il assimile et qu’il prenne conscience de ce qu’il s’est passé. Je sais que c’est frustrant, mais tu ne peux rien faire pour lui pour le moment. Laisse lui juste du temps. »
« Tu as raison… Pardon. »
Face aux paroles de son père, Akemi n’avait rien n’à redire. Au fond, il savait qu’il avait raison. Elle était devenue une invokeuse, elle devait accomplir son devoir et servir les gens avant toute chose et surtout, elle devait permettre aux âmes des défunts de trouver le repos qu’ils méritaient. Elle devait au moins bien cela aux habitants de sa chère île. Bien qu’encore faible, la jeune femme ne se démonta pas et en présence de l’autre invokeure, elle effectua la cérémonie d’accompagnement le cœur lourd, les yeux humides de larmes. Elle repensait à tous ses gens qu’elle connaissait et qui avait perdu la vie, elle repensant à cette fête de l’éclosion qui ne serait plus jamais la même. Cette danse qui avait toujours attirée l’admiration, n’avait plus qu’un goût de ses cendres sur ses lèvres. Et même si les furolucioles semblaient la remercier tout en s’envolant, elle ne pouvait empêcher ses larmes de couler de plus en plus. Si elle avait été plus forte, plus endurante, elle aurait sûrement pus aider bien plus de personnes que cela. Mais au lieu de cela… Il y avait eu tellement de mort… Juste après la fête, elle avait dû écouter quelques personnes venues lui parler, comme pour avoir un nouvel espoir, une lueur auxquelles se raccrocher, mais elle n’y arrivait pas. Fainéant la fatigue à l’aide de son père, elle avait à son tour, besoin de solitude, de noyer sa propre tristesse pour mieux absorber celle des autres. En voyant son île, ce tableau morbide, elle venait de prendre conscience de sa faiblesse toujours aussi flagrante. Elle n’avait rien pus faire, elle avait été inutile. Profitant d’être seule et surtout de ne pas être dérangée, la demoiselle se dirigea sur la plage, là où elle pourrait voir le cadavre de la mère de Seiji qui se tenait paisiblement dans un cercueil. Regardant ce corps sans vie et neutre, Akemi resta là, à la regarder silencieuse, avant de doucement poser sa main sur celle de ce corps inerte. Elle était froide, elle chaude, un constat qui fit de nouveau serré le cœur de la jeune invokeuse. « Je suis désolée, de ne pas avoir su vous protéger comme vous l’avait toujours fait avec nous… Ne vous inquiétez pas pour Seiji… Je prendrais soin de lui autant que je le pourrais. Je vous promets de ne pas laisser votre mort impunie. » Doucement sa main s’enleva de cette femme honorable qui avait toujours suscitée son admiration. Elle n’aurait jamais dû finir ainsi. Pas contre Sin.
Fermant doucement les yeux, Akemi regarda cette fois-ci l’horizon, avant de se tourner vers le temple. Il avait besoin de temps, mais elle, avait besoin de le voir, de le retrouver. Elle était incapable de savoir quelle heure il était, mais elle savait qu’elle ne pouvait le laisser à sa solitude. Marchant vers la forêt du temple, elle avait demandé à quelques personnes si Seiji avait été aperçu dans les environs. Ses recherches avaient souvent été récompensées par des réponses et bien qu’elle ait mis du temps, elle arrivait enfin à l’apercevoir dans son champ de vision. Il était là, recroquevillé sur lui-même, dans un état dans lequel elle ne l’avait jamais vu jusqu’ici. Mais qui ne serait pas aussi désespérée dans une telle situation ? Surtout quand on a perdus son seul parent ? Sentant les larmes venir à nouveau le long de ses joues, la jeune femme s’approcha alors de son ami et avec douceur, elle l’enveloppa dans ses bras sa tête se posant sur le haut de son épaule, comme pour étouffer ses propres larmes. « Je suis désolée. » Elle articula ses faibles mots, ne sachant si elle serait audible ou non. C’était une réalité bien trop dure et amère. Trop brute et trop triste et pourtant, c’était la réalité. Sans s’en rendre compte, Akemi resserra un peu plus son étreinte, comme si elle avait peur de perdre cet homme qu’elle aimait tant. Plus rien ne serait pareil et cela, elle le savait. Elle était impuissante, incapable d’arranger la situation, mais elle voulait lui montrer qu’elle était là pour lui, prête à se tenir à ses côtés pour affronter ce destin cruel dont ils étaient victimes.