Il avait accepté sa proposition sans vraiment débattre, suivant la demoiselle dans les couloirs de l’étage pour finir à deux, dans ce lit tantôt réchauffé, tantôt froid. Bien que l’idée fût de l’apaiser, Akemi se trouva soudainement mal à l’aise. Devait-elle dormir face à lui ? Lui tourner le dos ? Ne prenait-elle pas trop de place ? Devait-elle se rapprocher ou s’éloigner ? Petite, ses questions n’avaient jamais percuté son esprit, mais aujourd’hui, maintenant qu’ils étaient en âge ne plus avoir de sentiment insouciant, la situation lui paraissait insoutenable. Essayant de régulariser sa respiration, la prêtresse ferma alors les yeux, pour essayer de penser à autre chose qu’à son ami qui se tenait à ses côtés. Elle n’arrivait à trouver le sommeil et pour tout dire, elle était plus concentrée à écouter le souffle de son gardien qu’autre chose. Elle espérait qu’il puisse trouver le sommeil, qu’il puisse enfin se reposer après ses deux jours intenses en émotion. Les minutes s’écoulèrent et elle put entendre le souffle endormis de Seiji qui semblait avoir enfin rejoins les bras de Morphée. Doucement, elle s’était tournée vers lui, le regardant de ses grands yeux noisettes. La chambre était légèrement éclairée par les rayons lunaires, ce qui lui permettait de voir le visage assoupi de l’épéiste. Il était si beau quand il dormait, même quand ses traits semblaient tirés par le chagrin et la fatigue. Tout doucement, elle leva sa main vers le visage de celui-ci, mais prenant conscience de son geste, elle s’arrêta à quelques centimètres de son épiderme. Elle ne voulait pas le réveiller, ni lui adresser ce geste tendre dans ses circonstances. Ses lèvres se pinçant fortement, sa main revenant vers elle, elle soupira silencieusement, avant de se lever avec discrétion hors de son lit. Elle n’allait pas s’éloigner, elle voulait juste regarder le paysage nocturne que pouvait lui offrir cette petite chambre avant de s’assoupir à son tour. Regardant la lumière argentée qui se déversait sur les maisons et la forêt environnantes, Akemi resta là quelques minutes, le visage neutre. Soudain, sa main vint se plaquer contre la fenêtre froide, comme pour y découvrir un contraste entre sa chaleur et la fraîcheur de la nuit. Il faudra du temps avant que l’île et ses habitants retrouvent leur sourire et leur joie de vivre. Du temps pour que Seiji fasse son deuil, mais elle sera là, pour lui, pour les habitants. Elle remplirait son rôle d’invokeure, mais aussi de meilleure amie. Elle apportera cette joie perdue, apaisera les cœurs les plus meurtries, exactement comme elle voulait le faire avant tout cela. Avant l’arrivée de Sin. Doucement sa main se referma et s’approcha vers sa poitrine, à l’emplacement de son cœur. Son temps était compté, aussi elle devait l’utiliser à bon escient, sans remords, sans regret. Sur cette pensée, elle se glissa de nouveau dans les draps ou Seiji y dormait déjà et sans attendre, elle ferma ses yeux pour goûter à son tour d’un repos bien mérité.
Les jours passaient doucement, devenant bientôt une longue période. L’île était doucement en train de se reconstruire, le visage triste des habitants commençaient à reprendre doucement vie. Même si certains étaient morts beaucoup trop tôt, le temps lui ne l’était pas. Et tout doucement, chacun essaya de se reconstruire tant bien que de mal, bien que pour beaucoup, les blessures de cette soirée étaient encore trop douloureuses pour vivre dans cette insouciance d’antan. Chaque jour, Akemi se tenait présente pour ses personnes, apportant beaucoup de sa personne et de son temps. Tout en continuant de s’occuper de son ami et de ses parents, elle continuait à maintenir son rôle. Parfois elle se sentait fatiguée, éprouvée par le poids des aveux et de la tristesse de ses compatriotes, mais elle continuait malgré tout à garder son radieux sourire, sa douceur devenant un traitement rafraîchissant pour beaucoup. Plus le temps passait, moins on quémandait sa présence, parfois on venait la saluer, on lui parlait pour prendre de ses nouvelles, et cela s’arrêtait là. Il n’y avait pas plus, ou alors très peu. Kilika commençait à reprendre peu à peu le cours de sa vie et même si certains avaient encore des réticences, ils ne se stoppèrent pas pour autant. Alors qu’elle revenait du marché avec quelques condiments dans son sac afin de préparer le repas, la demoiselle remonta à son rythme la route qui menait à son nouveau chez elle. Depuis tout ce temps, elle n’avait pas quitté Seiji et revenait chez ses parents que pour prendre des nouvelles et passer un peu de temps avec eux. Petit à petit, elle s’était habituée à cohabiter avec le jeune homme, tellement que parfois, elle avait l’impression d’être une véritable jeune mariée. Rougissant à cette idée, la prêtresse secoua vigoureusement la tête, avant de continuer d’entreprendre sa route. Avant de rentrer, elle voulait faire un crochet chez ses parents. Depuis tout ce temps, elle n’avait trouvé le bon moment pour parler avec eux plus sérieusement, pour leur annoncer qu’elle connaissait les enjeux de son état de santé et de sa maladie. Plus elle repoussait et plus elle culpabilisée de s’être tut. De ne pas avoir abordée le sujet. Le moment était peut-être enfin venu de le faire ? Sentant la peur lui tenailler le ventre, Akemi inspira profondément avant de lever à nouveau son regard noisette vers l’horizon. Elle devait le faire, elle ne pouvait se laisser guider par la peur. Avec une détermination nouvelle, elle s’élança alors à l’ascension de cette route marchant avec une force qu’elle ne se connaissait pas. Quand elle fut à la hauteur de la bâtisse de ses parents, elle remarqua alors son père qui semblait être en pleine conversation avec quelques prêtres. Leur visage semblait sérieux et sombre, surtout celui de son père qui semblait bien plus autoritaire que d’ordinaire. En s’approchant, elle tendit doucement l’oreille, essayant d’écouter des bribes de conversation.
« Nous ne pouvons laisser les choses ainsi, sans rien faire ! Le retour de Sin était un avertissement et ses actions notre punition. Il va bien falloir qu’il s’en aille, sinon la colère de Yevon ne sera que plus grande encore. »
« Nous ne sommes pas surs que Sin soit revenue de son sommeil pour ça. Pour nous punir de sa présence. Ce n’est qu’une pure coïncidence et je ne dois pas être le seul à le penser. »
« Ne nous en veux pas Akira, notre décision est prise, tout comme la vôtre je suppose. Il faudra d’ailleurs que vous parlez à votre fille : Lady Akemi. Il serait temps qu’elle reprenne son pèlerinage. Bien que nous ne nous fassions pas trop d’espoir quant à sa réussite. »
Les voix se turent et les prêtres tournèrent le dos au père de la jeune femme qui semblait serrer fortement les poings. Bien que les mots étaient durs à entendre, Akemi préféra faire comme si de rien n’était, de façon à ne pas énerver encore plus son père. Avec lenteur, elle se rapprocha alors de lui, regardant quelques secondes les prêtres s’éloigner avant de porter son attention sur son paternel.
« Tout va bien papa ? Qu’est-ce qu’il te voulait ? »
« Rien… Rien dont tu dois te soucier pour le moment. »
Comme à son habitude, Akira gardait sa rancœur pour lui sans oser en parler aux autres. En constatant cela, la jeune femme compris alors, de qui elle tenait ce caractère renfermé. Elle était comme lui, gardant ses émotions enterrées au fond de son cœur, sans les partager, pour ne pas blesser autrui. Alors qu’il s’était mis à soupirer fortement, Akira se tourna alors vers sa fille, un sourire ne tarda pas à apparaître sur ses lèvres comme s’il essayait de se changer les idées. Doucement, il regarda le panier de victuailles que tenait la demoiselle, avant d’apposer sa main sur la tête de sa propre fille. « C’est bientôt l’heure du repas hein ? Tu salueras Seiji de ma part d’accord ? Je dois te laisser, je dois malheureusement retourner à mes occupations. » Déposant un baiser sur la tête de sa fille, le prêtre pris à son tour la direction du temple avant de s’évanouir à son tour au-delà de la forêt. Tout en le regardant partir, Akemi s’était mise à soupirer. Ce n’était pas aujourd’hui encore qu’elle allait pouvoir discuter avec ses parents et comme c’était fait là, sa mère était aussi de sortie au vu du silence qui se dégageait de la maison. Approchant de la demeure où elle séjournée avec Seiji, la jeune femme rentra alors, déposant ses sacs avant de s’exclamer. « Je suis rentrée. » Et sans attendre de réponse, ou de mouvement de la part de son ami, elle s’habilla d’un tablier, décidant de s’atteler à ce repas bien mérité non sans réfléchir à ce qu’elle avait entendue un peu plus tôt. De quoi parlait les autres prêtres à son père ? Qu’est-ce qui pouvait attiser la colère de Yevon ? Tout en coupant les aliments, elle se posait de nombreuses questions, espérant qu’elle trouverait le fin mot de cette histoire dans ses réflexions.