Décidée à suivre le jeune homme contre vents et marée et ceux malgré la menace de l’église qui l’accuserait de tout les torts, Kiera resterait. Non pas par amour, ni par forte amitié envers le jeune homme, non, disons plus par loyauté, mais aussi par désir de découvrir avec lui cette vérité tant recherchée. Malgré son appartenance à l’église, Soren était plus réfléchis, et malgré quelques défauts insupportables, il était une personne de confiance. Et ça Kiera ne pouvait dire le contraire. Par deux fois, il lui avait sauvée la vie, alors qu’il ne lui devait rien, par deux fois, il l’avait protégé du courroux de l’église. Cela suffisait pour savoir qu’il n’était pas une personne mauvaise, ni mal attentionnée.
Face à la remarque et sourire amuser du jeune homme, la jeune femme lui répondit sur le même ton, répondant d’un air et d’un haussement d’épaule faussement détaché. « Eh, ça m’arrive d’être humaine, et ça arrive aussi que oui, les idées manquent pour pimenter mon quotidien. Donc heureusement que tu es là Blondie ! Sinon je serais en train de m’ennuyer dans la via !» Depuis quelques temps leur relation avait évolué. D’une relation méfiante, sujet à disputes quotidiennes, ils étaient devenus plus complices, plus soudée. Comme quoi, partager des embrouilles pouvaient au final resserrer des liens et puis, quand il s’exprimait avec aise et sans détour, l’invokeur n’était pas aussi désagréable. Proposant de changer ses bandages pour éviter tout risque d’infection, l’al-bhed attendit une réponse positive du blessé, avant de se lever avec son équipement dans les mains. Son regard ne se portant nullement sur son torse découvert. Après tout, elle l’avait déjà vu et voir un homme nu n’était pas quelques choses qui pouvait l’émoustiller d’un rien, pas comme une nonne timide. Dévissant le désinfectant qu’elle appliqua sur une compresse, la jeune femme eut un sourire carnassier sur son faciès quand elle entendit la remarque de Soren, riant même d’un air sadique avant de lui répondre. « Oui bien sûr ! Si jamais tu entends l’écho d’une voix colérique, c’est sûrement que ça met destinée ! » Prévenant sur les picotements que son geste pouvait provoquer au blond, Kiera s’attela à déposer la compresse par à coup sur la plaie, remarquant que celle-ci semblait avoir cicatrisée bien plus vite qu’il ne l’aurait fallu. Décidant de ne pas le questionner pour le moment dessus, la jeune femme laissa le loisir à Soren de répondre à ses précédentes réflexions, se concentrant en même temps sur sa tâche, bien qu’un air amusé ne tardât pas à se dresser sur ses lèvres. « Mec… Je ne sais pas pour les autres, mais je l’ai vu direct en te voyant. T’as pas cet air puant qui semble dire : J’ai les pleins pouvoir sur toi ! » Puis arrêtant de désinfecter la plaie de l’invokeur, Kiera approcha sa main d’une autre compresse, déposant cette fois une crème cicatrisante dessus pour l’apposer sur la plaie, de façon à aider à la progression de sa fermeture. Ainsi donc, Soren était destiné à devenir un membre de la grande famille de Bevelle. Au fond, la demoiselle s’en doutait un peu, il était trop propre et orgueilleux pour avoir vécue une vie de misère. Et en général les enfants de ce genre de famille ne choisissaient que très peu leur destinée, se laissant même porter sans trop réfléchir sur le sens de la vie.
Défaisant un bandage pour pouvoir la mettre autour de la compresse et de l’épaule du jeune homme, Kiera continuait d’écouter, un sourire ironique déformant ses traits quand le jeune homme lui expliqua qu’il n’avait jamais vraiment cherché à réfléchir, ni à se poser de question sur ce qu’il ne lui allait pas dans l’église. « En même temps, je doute qu’ils vous apprennent à réfléchir sur leur agissement. Je suis sûre qu’ils sont du genre, crois en ma parole véritable et ne te fis qu’à ça. Un peu comme un genre d’hypnose quoi. » C’était très exactement l’image qu’elle se faisait de ce genre d’établissement. Ce n’était pas pour rien qu’à ses yeux, les prêtes étaient véreux. Continuant sur sa lancé, Soren expliqua que Sin avait été le déclencheur pour lui, celui qui lui fit ouvrir les yeux sur la réalité des choses, sur les mensonges de l’église. Approchant de l’épaule et de son torse pour faire tenir le bandage, la jeune femme détourna son regard de sa tâche pour regarder dans le blanc des yeux l’invokeur, avant de porter attention sur cette main que le jeune homme semblait regarder avant de la refermer. Pourquoi les gens n’étaient pas plus comme lui ? Pourquoi personne ne se posait de question surtout après avoir vus Sin à l’œuvre ? Il était évident que quelques choses clochaient, que tout ça dépassait leur entendement, mais non… Trop de personne faisait confiance à l’église, trop d’ignorant qui préférait fermer les yeux que de les ouvrir. Soupirant, tout en reportant son regard sur le jeune homme, Kiera l’observa sans rien ajouter, un sourire s’affichant finalement, comme pour répondre au jeune homme. « Ouais. Je sais maintenant à quel point ne t’es pas si con finalement. Dommage que les gens ne soient pas plus comme toi… » puis finissant de fixer le bandage autour du torse du jeune homme pour pouvoir la maintenir, la jeune femme se mit à soupirer en entendant cette fameuse question qu’elle redoutait d’entendre. Et toi ? Comment tu es arrivée là ? Il était évident que sa curiosité allait se retourner contre elle et elle le savait, après tout… C’était toujours donnant, donnant.
« Aha… Franchement ce n’est pas une histoire passionnante, mais bon, si tu veux vraiment savoir… » Détournant son regard pour ranger ses affaires de soin, la rousse retourna à sa place initiale, levant la tête vers le plafond, avant de répondre enfin au jeune homme. « Je n’ai pas connus mon père, il s’est barré quand ma génitrice était une cloque de moi. Un lâche sans couille quoi, comme beaucoup. J’ai donc vécu avec une loque, qui passait son temps à boire, à me reprocher le départ de son soi-disant « amour de sa vie » tout en me contant tous les jours, son putain discours que l’amour ce n’est pas bien, tu donnes sans retour et bla et bla et blaaaa. » Tout en mimant des gestes dédaigneux, Kiera reprit après un soupir agacé. « Elle ne s’occupait pas de moi, donc j’ai dû apprendre à me débrouille seule, j’me tapais souvent des remarques, ou de la pitié de la part de mon clan, ce qui avait le don de m’agaçait. Donc je me battais pas mal et j’ai finis par envoyer chier cette femme pitoyable quand celle-ci avait décidée de reprendre sa vie en main. C’est-à-dire à mes douze ans quoi. » Serrant la main en repensant à ses souvenirs, l’al-bhed reprit, mais cette fois avec ironie. « Mais tu sais pourquoi cette garce s’était repris ? Parce qu’elle avait trouvé un homme… Le grand amour de sa vie tu vois ! Donc à partir de là, elle a voulu faire sa mère modèle, mais c’était hors de question. Elle n’avait jamais été là, je n’avais pas besoin d’elle. Et je n’avais pas envie de participer à son hypocrisie. Elle s’est mariée avec ce pauvre type et ils sont morts ici, avant d’atteindre leur destination pour leur lune de miel. Une belle ironie quand on y pense, mais pour une fois, je dirais bien, merci Sin pour lui avoir rendus la monnaie de sa pièce. » Elle semblait sérieuse, ne regrettant aucunement la mort de sa mère. Pour elle, elle n’était qu’une étrangère, une personne insignifiante comme tant d’autres. « Après sa mort, les membres de mon clan commençaient à me gaver, donc je suis parti à l’âge de quinze ans pour faire ma vie ailleurs. J’ai papillonné jusqu’à l’histoire que tu connais. Tu vois, rien de génialissime. Une vie comme une autre quoi. » Baissant sa tête pour ensuite regarder le jeune homme, Kiera lui adressa un sourire amusé, se demandant si son histoire l’avait choqué ou non. Après tout, de nombreuses personnes lui avait reprochée d’avoir été dure avec sa mère, qu’elle devrait s’en vouloir pour son comportement, mais elle ne le voyait pas de cette façon. Personne ne pouvait véritablement comprendre ce qu’elle avait dû endurer petite. Le manque d’attention de la part d’une personne qui doit prendre soin de vous, le regard jugeur des gens qui ne sont que spectateur. Les paroles blessantes qui se déversent en continue chaque jour. Non… Personne n’avait le droit de la juger, car personne n’aurait pus endurer comme elle l’avait fait.
Reportant son regard sur l’épaule blessé de Soren pour penser à autre chose, la jeune femme indiqua d’un signe de tête ce qu’elle observait, décidant qu’il était temps de le questionne à présent. « Au fait, comment ça se fait que ton épaule soit presque résorbée ? Une blessure comme ça, ça ne se referme pas aussi vite. Ne me dit pas que t’as usée de tes charmes pour avoir des soins gratos ? » Ajoutant une touche d’humour pour éviter de mettre le jeune homme sur la défensive, Kiera attendit de voir si Soren allait lui raconter ou non la vérité. Après tout, ça pouvait aussi tout bonnement le regarder lui, bien qu’elle était curieuse de savoir comment.