Lilia
Bannisseur
Le soleil atteignait tout juste son zénith lorsque Lilia se décida enfin à sortir de son lit pour se glisser dans sa douche, visiblement aussi rayonnante que d'ordinaire.
Elle aimait les grasses matinées. L'effervescence qui animait peu à peu les bruits du marché, près de chez elle nourrissaient sa bonne humeur et lui donnaient toujours envie de passer le reste de sa journée dans les rues commerçantes, qu'elle connaissait pourtant déjà presque par coeur. Elle aimait cette ville et ses habitants, son architecture et les nombreux endroits qu'elle mourrait encore d'envie de découvrir, à chaque fois qu'elle les apercevait. Elle aimait le Blitzball, le port, et tout ce qu'elle avait pu y apprendre, depuis qu'elle était arrivée.
Luca l'avait conquise et, inconsciemment, Lilia se mît à sourire bêtement aux quelques rayons de Soleil se faufilant à travers la petite fenêtre de sa salle d'eau.
Elle frissonna tout doucement lorsqu'un petit courant d'air chaud vînt accompagner les quelques gouttes d'eau roulant contre sa poitrine, ferma les yeux et inspira, doucement. Tout, absolument tout, s'était déroulé à une vitesse remarquablement hallucinante. Elle n'avait qu'à peine vu cette année s'écouler et voilà qu'elle passait ses dix-huit ans. Déjà. Ou seulement. Elle n'en savait pas grand chose, vivait à l'instinct et avançait simplement sur un chemin qu'elle ouvrait elle-même sous ses pieds. Sans vraiment prendre la peine de regarder derrière elle quand bien même elle le regrettait, encore, malgré les nombreux mois qu'elle avait regardé filer.
Elle avait espéré, un moment. Qu'il revienne, qu'il lui dise qu'il avait compris, et qu'il était prêt à l'emmener avec lui. Elle y avait cru, un moment. Juste un moment. Et lorsque l'espoir s'était mué en une légère déception, elle n'avait pas pu s'empêcher de s'en vouloir à elle-même. D'avoir été aussi peu précise et légère. De ne pas avoir pris la peine de tout lui expliquer, vraiment, comme il le fallait. Elle aurait préféré le voir la rejetter parce qu'il ne voulait pas d'elle, pas seulement parce qu'il n'avait potentiellement pas réellement compris ce qu'elle cherchait à lui avouer.
Un petit soupir s'échappa d'entre ses lèvres, remontées en une moue contrariée. Elle avait été stupide, elle le savait. Au moins autant qu'elle savait que, si elle en avait l'occasion, elle ne manquerait pas de prendre la peine de tout correctement lui expliquer.
– Mah, les chances pour que tu le revoies sont vraiment très minimes, ma grande.
Sa voix résonna entre les murs de sa salle de bain et elle grimaça légèrement en s'aperçevant qu'elle se retrouvait, une fois de plus, confrontée à une solitude qu'elle avait acceptée sans réellement l'aimer. Être seule ne l'avait jamais dérangée. Se sentir seule, en revanche...
Lilia secoua la tête, fronça les sourcils. Elle n'avait ni le temps, ni l'envie de se morfondre. Surtout pas l'envie, en vérité. Elle avait passé bien assez de temps à se remettre en questions, lorsqu'elle avait rejoint les Bannisseurs. Et si elle n'avait pas ouvertement pleuré, elle avait souvent manqué de se laisser aller à toute la peine qui lui tordait le coeur à chaque fois qu'elle repensait à la façon remarquablement ignoble dont elle l'avait rencontré.
Pourtant, et parce qu'elle était décidée à convenablement occuper sa journée, la jeune femme s'empressa de terminer sa douche et enfila la première robe légère qui lui passa à portée de main, l'air revigoré quand bien même sa poitrine lui semblait atrocement serrée. Elle était douée pour feindre les sourires et la bonne humeur. Douée pour tout cacher. Elle l'avait prouvé, pendant un mois. Un mois tout entier au cours duquel elle avait tout gardé secret, pour mieux le lui raconter après. Il était le seul à savoir, et il le resterait. Elijah n'avait pas besoin de s'inquiéter, et il était hors de question qu'elle donne raison à son père, quant aux avertissements qu'il lui avait donnés.
Légèrement démoralisée, Lilia acheva tout de même de calmement se préparer et remonta ses cheveux en une queue haute battant le creux de son dos, surprise de constater qu'ils avaient autant grandi, en aussi peu de temps. Est-ce qu'elle devait se les faire couper ? Est-ce qu'il aurait préféré qu'elle les coupe ?
Elle secoua doucement la tête, se sourît à elle même dans le miroir et inspira longuement avant d'attraper son petit panier, posé sur le côté. Se poser des questions qui n'obtiendraient jamais réponses ne l'aiderait pas à avancer. Encore moins à faire le deuil d'un semblant de premier amour parfaitement tué dans l'oeuf. Semblant ? Non, elle pouvait dire avec certitude qu'elle l'avait aimé. Un peu. Assez pour que ce soit douloureux. Mais rien qu'elle ne puisse pas surmonter.
Alors, malgré le léger pincement dans sa poitrine, Lilia s'arma de son plus agréable sourire et sortît de chez elle à la recherche d'un réconfort qu'elle se savait capable de trouver dans les rues colorées de Luca.