La tente de commandement avait une atmosphère familière. Les lanternes suspendues émettaient une lumière tamisée, conférant à ces lieux une atmosphère propice à la réflexion. Une table massive se trouvait au centre de la pièce, et sur elle, de nombreux livres aux couvertures vétustes. Le commandant attrapa l’un des ouvrages qui trônait sur la table, et le rangea méticuleusement dans l’étagère rudimentaire qui lui servait de bibliothèque. « Je me souviens d’un jeune homme capable et volontaire, assez idiot pour se battre seul si cela était nécessaire. Et aujourd’hui, je retrouve un garçon lâche. Un gamin terrifié, qui détourne le regard de ceux avec qui il a jadis combattu. » Régis se retourna, faisant face à Seiji. « Et quoi ? Vous pensez que je vais la mettre en danger, juste pour vous plaire à nouveau ? » un rictus amusé passa sur les lèvres de Régis, qui ne se démonta pas. « N’était-ce pas justement pour la protéger, que tu te battais ? » l’expression de Seiji se déforma. Sa main se crispa sur son bras. « Elle pourrait mourir. » Régis le toisa longuement, avant de reprendre la parole. « Elle pourrait mourir n’importe quand. Sin, sa maladie. Un monstre, une chute, un accident, un naufrage, ou que sais-je encore ! Et même en sachant cela, tu t’es éloignée d’elle pendant des mois, dans le seul but de trouver un remède. Qu’est-ce qui a changé ? » Seiji s’était refermé sur lui-même, le regard douloureux. Régis s’arrêta, et l’observa en silence. « … C’est Kilika ? » Seiji soupira. Puis, il chassa du dos de la main la larme qui se formait au coin de son œil. « Ma mère. » Régis inclina légèrement la tête. Seiji reprit contenance, retrouvant une respiration plus calme. « Quand j’ai perdu ma tendre Eliana, j’ai cru que tout était de ma faute. Il m’a fallut longtemps, très longtemps, avant de comprendre qu’il existait certaines choses sur lesquelles je n’avais aucune emprise. » le regard de Seiji s’égara dans le vide quelques instants. « Une cage dorée ne la protégera pas. Si tu t’obstines, tu ne feras que perdre un temps précieux. » les paupières de Seiji se refermèrent. Puis, le jeune homme soupira, se résignant à l’évidence. Régis se détourna, et s’approcha de sa bibliothèque. Il en retira un livre usé, à la couverture cramoisie. Puis, le commandant s’avança vers Seiji, et lui tendit le livre. « Tu devrais le lire. N’oublie pas de me le rendre avant ton départ. »
Lena pouffait intérieurement. Akemi s’était littéralement étranglée en l’entendant, et le sourire d’Alan n’arrangerait certainement pas les choses. Lena devina une pointe de contrariété dans l’inspiration de la jeune femme qui l’accompagnait, mais ne s’en préoccupa pas davantage. Alan s’avança à leur rencontre, accompagné de deux autres Bannisseurs. Quand Akemi se présenta, Alan échangea un regard avec Lena. « Et mignonne avec ça. » ils ignorèrent en bonne et due forme le sous-entendu dubitatif de la jeune femme, échangeant un regard entendu. Derrière Alan, une autre voix soupira d’exaspération. Il était encore jeune, pourtant, ses cheveux gris argent et son regard clair rendaient difficile toute tentative de lui donner un âge précis. Légèrement plus petit que Alan, son regard trahissait l’agacement que lui inspirait ses deux confrères. Toutefois, sitôt son attention posée sur Akemi, le jeune homme afficha un sourire calme et accueillant. « Enchanté Akemi. Je suis Harken. Je te présente Alan, et Elissa. » les deux intéressées acquiescèrent d’un signe de la tête. « Bienvenu parmi nous. » Harken lui adressa un sourire. Puis, une voix en provenance du terrain d’entraînement interpela Harken. Celui-ci adressa un signe poli à Akemi, et retourna à ses occupations. Elissa lui emboita le pas, laissant Akemi seule avec Lena et Alan. « Et du coup, ils ont… » Alan pressa ses index l’un contre l’autre. Lena haussa les épaules. « Aucune idée. Ils sont ensemble, mais Seiji n’a rien dit de plus. » Alan claqua sa langue contre son palais. Puis, il posa son coude sur l’épaule d’Akemi. « Une fille comme toi, je suis sûr que Seiji a… Tu sais. Il s’est montré plus… audacieux. » Alan lui lança un clin d’œil. À quelques mètres de là, la voix de Harken s’éleva dans leur direction. « Montrez lui les écuries, au lieu de vous comporter comme des idiots ! » Alan grogna, et adressa un signe de la tête à Akemi pour l’inviter à le suivre. Lena se joignit à eux, rejoignant un petit bâtiment rudimentaire excentré du camp.
Les piaillements des Chocobos s’élevaient de façon régulière. Plusieurs Chocobos imposant courraient dans le manège prévu à cet effet. Sous un abri, un jeune homme brossait méticuleusement les plumes de l’un des volatiles. Près de lui, un petit Chocobo, de la taille d’un poussin, courrait frénétiquement en pépiant joyeusement. « Et voilà les écuries de nos fidèles compagnons. Certains Chocobos servent de monture aux cavaliers. Les autres nous sont utiles pour déplacer notre campement d’un endroit à l’autre. Ils nous accompagnent partout. » Lena passa les bras derrière sa nuque, affichant un large sourire. « Vas-y, approche-toi. Ils sont joueurs, mais tu ne trouveras pas plus gentils. Quand tu auras fini, on te montrera le hall d’entraînement. » Alan lui adressa un signe de la tête, invitant la jeune demoiselle à faire connaissance avec leurs joyeux compagnons.
Il se dégageait de lui une humeur massacrante. Cela faisait plusieurs minutes que Seiji errait dans le camp, seul avec ses pensées, les sourcils assez froncés pour faire fuir n’importe quelle âme charitable. Évidemment, ce vieux fou avait raison. Et pourtant, était-ce vraiment si simple ? Seiji soupira pour la énième fois, et frappa du pied une pierre qui trainait sur son chemin. Quand il leva finalement la tête, il distingua le terrain d’entraînement à une petite dizaine de mètres. Les deux silhouettes qui s’entraînaient le devinèrent, et lui adressèrent un geste de la main. Seiji soupira, et se résigna à les rejoindre. Quand il arriva à leur hauteur, Harken afficha un sourire amusé. « Tu as l’air d’une humeur massacrante. » Elissa échappa un rire pincé. Seiji décida finalement de prendre sur lui, et inspira profondément. « Content de vous revoir. » Elissa le regarda, puis désigna les écuries. « Ils l’ont amené aux écuries. Si tu y vas maintenant, tu devrais les croiser sur le chemin du retour. » Seiji hocha la tête, jetant un regard vers la direction indiquée. Harken le fixa quelques instants, avant de reprendre la parole. « Que dirais-tu d’un petit entraînement ? » Elissa tendit son arme à Seiji, prenant le jeune homme de court. « Tiens ! Ça fait longtemps. Et de toute façon, je n’arrive toujours pas à contrer Harken. » elle lança un regard contrarié à Harken, qui répondit d’un sourire. Pendant ce temps, Seiji soupesa l’arme dans sa main. Un sabre d’entraînement, à la lame usée par de nombreuses heures d’entraînement. Harken fit un signe de la main à Seiji, qui s’avança. La brise et le soleil avaient encouragé les Bannisseurs à s’entraîner dehors, en dépit du hall d’entraînement qui se trouvait non loin. Puis, Harken s’élança.
Son épée siffla avec violence. Sa première frappe percuta de plein fouet le sabre de Seiji, qui dévia à peine le coup. Mais déjà, le jeune homme au cheveux gris revenait à la charge. Seiji bloqua deux coups vifs, et frappa vers l’avant. Son adversaire dévia son coup, et immobilisa son épée à quelques centimètres de la gorge de Seiji. Ils se regardèrent durant de longues secondes, sans que l’un ou l’autre ne prononce un traitre mot. Puis, Seiji frappa à nouveau. Quatre coups vifs, que Harken dévia les uns après les autres. Seiji frappa à nouveau, et son adversaire esquiva le coup. D’un geste sec, Harken désarma Seiji, et enfonça la pointe de sa lame contre le torse du jeune homme. « Depuis combien de temps n’as-tu pas tenu un sabre ? » Seiji lui lança un regard noir, mais Harken ne se démonta pas. « Si tu ne peux pas te battre, tu n’as rien à faire là. Personne ici n’a besoin de quelqu’un qui nous mette en danger. » Seiji le fixa sans un mot, une colère glacée dans le regard. Puis, le jeune homme lâcha un grognement, et tourna le dos à Harken. « Seiji, attend ! » Elissa tendit une main dans sa direction, mais déjà, le jeune homme s’éloignait du hall d’entraînement. Vibrant de colère, Seiji n’avait qu’une chose en tête : trouver un endroit où il pourrait être seul.